Médisite du 14 juin 2024

Mes recommandations concernant les T.C.A.

Les yaourts hyper-protéinés sont un choix de plus en plus populaire, mais en tant que diététicienne-nutritionniste spécialisée dans les comportements alimentaires, j’ai quelques réserves sur leur intérêt pour la santé. En lisant cet article, plusieurs parallèles me sont venus en tête avec les troubles du comportement alimentaire (TCA) et les impacts de ces produits, notamment pour les personnes souffrant d’hyperphagie, d’anorexie mentale ou encore de boulimie.

 

Ces yaourts riches en protéines sont souvent vendus sous une image de "santé" et de "fitness", mais la réalité est plus complexe. Les additifs, édulcorants et épaississants qu’ils contiennent modifient le goût naturel, habituant les consommateurs à des saveurs artificielles. Ce détail est loin d’être anodin, car il peut influencer la perception du goût, ce qui peut être particulièrement problématique pour les personnes souffrant de TCA, comme l’anorexie boulimie ou l’hyperphagie boulimique. En s’habituant à des aliments ultra-transformés et artificiellement sucrés, il devient plus difficile de maintenir un lien sain avec une alimentation naturelle et variée, une étape pourtant essentielle dans la prise en charge des troubles alimentaires.

 

Les produits ultra-transformés comme les yaourts hyper-protéinés peuvent également avoir un effet délétère sur le comportement alimentaire, surtout en cas d’hyperphagie. L’effet de ces aliments allégés en sucres mais riches en édulcorants peut engendrer des pulsions alimentaires et des envies intenses de sucre. Chez les personnes atteintes d’hyperphagie boulimique, cette réaction peut aggraver les épisodes de surconsommation, où la sensation de satiété peine à être atteinte. Par ailleurs, ces aliments peuvent entraîner une sorte de "dépendance au goût sucré" sans pour autant apporter un réel plaisir gustatif ou nutritif, ce qui accentue l’instabilité des comportements alimentaires.

 

Concernant la question des protéines, beaucoup de consommateurs, y compris les personnes aux prises avec des TCA, peuvent percevoir ces yaourts hyper-protéinés comme un moyen de gérer leur alimentation tout en évitant certains aliments plus caloriques. Cependant, cette approche peut renforcer une forme de contrôle alimentaire rigide qui s’avère souvent contre-productive. Dans le cas de l’anorexie mentale, par exemple, il est fréquent de rechercher des aliments faibles en gras mais riches en protéines pour maintenir une restriction calorique tout en justifiant un apport nutritionnel. Or, cet équilibre entre protéines et calories ne peut être correctement maintenu avec des produits artificiels. Une alimentation diversifiée, qui intègre des protéines naturelles (comme les œufs, le poisson, ou les viandes maigres), est préférable pour une bonne santé physique et psychologique.

 

De plus, la recommandation de privilégier les yaourts classiques plutôt que les versions hyper-protéinées prend tout son sens en matière de coût, un élément non négligeable surtout quand on connaît le budget souvent élevé des soins pour les personnes souffrant de TCA. Alors que le prix des yaourts hyper-protéinés a grimpé, leur rapport coût-bénéfice reste discutable, surtout pour une population qui pourrait tout aussi bien bénéficier de yaourts naturels et moins transformés.

 

En conclusion, les yaourts hyper-protéinés ne sont pas la solution miracle qu’ils prétendent être, surtout pas pour les personnes avec des troubles du comportement alimentaire comme l’hyperphagie ou l’anorexie boulimie. En travaillant sur une alimentation plus naturelle et moins transformée, nous pouvons aider à rétablir une relation saine avec la nourriture, ce qui est fondamental dans le traitement des TCA.

Les yaourts hyper-protéinés, une fausse bonne idée ?

Les laitages supplémentés en protéines ont la côte chez les Français, en particulier pour les sportifs. Caroline Seguin, diététicienne-nutritionniste spécialisée dans les comportements alimentaires, explique à Medisite pourquoi elle ne les recommande pas.

Vous connaissez peut-être ces desserts enrichis en protéines qui occupent une bonne place dans les rayons laitiers des supermarchés depuis 2019. Un Français sur dix en consomme aujourd’hui.

 

 

Yaourts hyper-protéinés : des produits "lights" ?

 

Comme les yaourts traditionnels, ils se présentent sous plusieurs formes (yaourts à boire, crèmes desserts…), mais uniquement avec un arôme (vanille, chocolat, fraise, citron, caramel…). Pas de version "nature" pour ces produits dits "lights", ce que décrie Caroline Seguin, diététicienne-nutritionniste à Toulouse : "Il n’y a pas de sucres dedans mais de l’édulcorant, avec lequel le consommateur s’habitue au goût aromatisé et sucré, ce qui déforme sa palette aromatique."

 

Au rayon des bienfaits, on peut relever leurs apports en probiotiques (bactéries bénéfiques) puisque ces produits sont fermentés. Les industriels vantent leurs faibles apports en calories (le lait est écrémé), ainsi que leur très bonne quantité en protéines. C’est pourquoi les sportifs en raffolent avant et/ou après la séance de musculation par exemple. Pour rappel, les protéines présentent un intérêt dans la digestion, la réponse immunitaire, le transport de l’oxygène, mais jouent surtout un rôle structural, participant au renouvellement des tissus musculaires.

 

 

Yaourt traditionnel ou yaourt hyper-protéiné ?

 

Riche en protéines, ce type de yaourt présente-t-il plus d’intérêts nutritionnels qu’un yaourt traditionnel ? La diététicienne de Toulouse apporte des éléments de réponse.

 

Fabriqué avec du lait écrémé, le yaourt hyper-protéiné apporte moins de matières grasses et est donc faiblement calorique. Toutefois, les pots sont plus gros (160g au lieu de 125g pour un yaourt classique), ce qui revient au même en termes de calories. L’écrémage du lait n’apporte donc que peu d’intérêts ici.

 

Par ailleurs, "les yaourts hyper-protéines vantent le fait de contenir des protéines spécifiques "whey" [les sportifs en consomment en poudre, de manière synthétique], des protéines de lait qui sont tout simplement dans le lactosérum comme dans tous les laitages fermentés", avertit Caroline Seguin.

Des produits ultra-transformés

 

Il peut être intéressant de comparer les quantités de protéines entre différents laitages de 100g. Ainsi, le yaourt classique en contient 4,5%, alors que le yaourt hyper-protéiné en contient 9%. On retrouve 7,5% de protéines dans le fromage blanc, 9,5% dans le petit suisse et 10% dans le skyr, ce yaourt islandais qui a le vent en poupe. "Ce n’est pas forcément intéressant de se supplémenter en protéines avec ce type de produits car on n’a pas de problèmes d’apports en France avec les produits carnés, les poissons etc.", justifie la diététicienne.

 

De plus, les industriels ajoutent des additifs aux yaourts hyper-protéinés, lesquels sont donc ultra-transformés. Dans les yaourts classiques, il y a du lait avec uniquement des ferments lactiques, alors que dans les yaourts hyper-protéinés, il y a du lait écrémé avec des épaississants (souvent de l’amidon transformé de maïs, de la gomme de guar) et des édulcorants (du sucralose, de l’acésulfame K et parfois de l’aspartame, suspectés d’être neurotoxiques).

 

 

"Mieux vaut consommer un yaourt classique et compléter sur la journée"

 

La diététicienne ne recommande donc pas ce type de produits dans le cadre d’une alimentation équilibrée classique, même pour les personnes âgées qui peuvent parfois manquer d’apports en protéines. "Mieux vaut consommer un yaourt classique et compléter sur la journée avec des produits naturellement riches en protéines, tels que les viandes/poissons/œufs, un peu de fromage…, conseille Caroline Seguin. Avec la croûte c’est encore mieux, car elle contient des ferments lactiques bénéfiques pour la flore digestive."

 

Enfin, ne jetez pas le "jus" du yaourt puisque les protéines du lactosérum (les fameuses "whey") sont dedans !

 

Dernier argument contre les yaourts hyper-protéines : leur coût. Avec l’inflation et leur succès, le prix au kilo est passé de près de 6 euros en 2021, à 9 euros aujourd’hui.